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    Melo' a le regard rivé sur le sol. Comme s'il l'obsédait. Comme si un champ magnétique attirait irresistiblement son regard.

    Namoga avait la même expression sur son masque. Ce qui expliquait le fait qu'elle la comprenne tant... Elle était vêtue d'une longue robe pourpre, simple. Son regard avait quelque chose de mystérieux, d'indétectable. Mais Melo' savait qu'à travers ce regard, elle n'avait pas à avoir peur. Plus à avoir peur d'être jugée.

    " Namoga ... Si tu savais comme c'est dur d'avoir à porter l'heureux voile, quand on sait que ce n'est qu'un mensonge du coeur. Je fais ça pour ne pas éveiller leur attention. Pour me faire transparente et impassible. Mais à quoi bon les jolis mots ? Pourquoi inviter le bonheur alors que le malheur frappe au seuil de ma vie ? Je suis une incompréhension humaine. J'ai un comportement contraire à ce que je pense vraiment. Pour ne pas leur montrer qui je suis. Pour ne pas leur faire peur. Pour être parfaite aux yeux de Davko... Mais ce voile est trop lourd pour ma conscience. Si tu savais Namoga... "

    Namoga s'approcha de Melo' et prit délicatement les mains frêles de la jeune fille. Ce geste avait quelque chose de serein, d'apaisant. Pour la première fois, Melo' leva les yeux pour chercher le regard de son interlocutrice.

    Namoga et Melo' s'étaient connues lors d'une autre pièce jouée, " Critique de la société d'aujourd'hui ". Cette pièce traitait de la bêtise humaine et de la Sainte Cruauté, de l'hypocrisie sous toutes les formes. Celle qui pousse les gens à dire des choses admirables par souci de fausse charité. Pour lisser son image. Celle qui pousse les gens à s'aliéner et à se mentir à eux mêmes. A rendre la vérité douce et agréable, voire illusoire. Une des séquences de cette pièce mettait en scène une jeune fille, ingénue, voire totalement niaise. Cette dernière prônait l'usage d'un langage vulgaire, en tout endroit. Car elle pensait que c'était en vogue. Que parler de manière plus " raccourcie " lui ouvrirait n'importe quelle porte. De surcroît, cette demoiselle se plaignait d'une solitude naissante. Son ancien fiancé était un goujat de la pire espèce. Mais elle avait cette naïveté, presque pathologique, qui l'empêchait de le cerner en tant que tel.

    " Jvois pas où qu'il est mon problème ! J'suis parfaite ! Et me voilà refusée dans vot' put*in de cercle de littéraires ... Vous lisez du Mozart hein ? ", s'indigne la candide.

    Eclat de rire général de la part de la communauté. Mais Melo' et Namoga ont un rire cynique. Ce rire qui dérange. Qui raisonne, qui fait mal. Qui ne trompe pas sur le message de méchanceté envoyé. Cette cruauté pesante dans l'assemblée jeta un froid dans la salle. Un lourd silence. Insoutenable.

    " Pauvre sotte... Avant de vouloir entrer dans la communauté, apprends d'abord à parler correctement. Ca ne doit pas être chose aisée pour toi d'avoir un langage décent, mais pour nos pauvres oreilles, aie pitié de nous... Tais-toi. ", déclara Namoga, avec une pointe d'impudence.

    " Et précision : Mozart n'était pas écrivain mais musicien. Alors avant de te targuer de ta supposée perfection, cours t'acheter des neurones. Tu as peut être la beauté d'un tableau mais tu as la bêtise de ces bêtes de foire... ", rajoute insidieusement Melo'.

    La demoiselle s'indigne d'abord en insultant les deux jeunes filles de tous les noms. En levant la main au ciel, comme si elle lancait une malédiction. Mais elles la considèrent avec mépris et dédain. La niaise, voyant que ses injures n'ont pas d'effets, s'en va avec un bruit étouffé de larmes...

    Fière de leur action, elles se regardent avec cet air complice et ricanent machiavéliquement. Mais la communauté ne le voit pas de cet oeil...




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    Arrivée à la maison, Melo' sent son coeur battre. Il bat fort, comme si la peur le prenait soudainement. Peur de voir que quelqu'un l'empêcherait d'assouvir son vice virtuel.

    La chambre est éclairée par la lumière du soleil. Melo' s'avance à pas irrésolus. Elle sait que si elle voit son grand frère, une colère tyrannique s'emparera d'elle. Il l'empêchera de vivre son autre vie. De rêver quelques instants. Melo' pousse la porte, entrouverte, et découvre un siège vide.

    *
    Ouf... Un poids en moins sur ma conscience. *

    C'est alors que s'ouvrent les rideaux. Internet, le vaste théâtre. Une grande tragédie. Melo' enfile le masque de la béatitude complète. Des gouttes tombent de son masque et s'échouent sur le sol poussiéreux de la salle. Mais son masque affiche un grand sourire. Melo' sourit au public. Mais derrière ce masque, il y a toujours quelque chose qui l'empêche de ne faire qu'un avec ce voile.

    Oui, elle met ce masque pour se protéger. Pour chaque pièce qu'elle joue, elle change son attitude, radoucit sa voix, dément son coeur et agit contre ses sentiments. Elle se cache derrière ses personnages. Des fois, elle parvient à faire miroiter aux autres celle qu'elle est vraiment. *
    Mais quand vas-tu laisser tomber ce masque ? * Jamais. Par mesure de précaution. Melo' prend soin de son masque, de son image.

    Bien des personnes ont tenté de lui arracher ce voile, cet artifice. Mais il fait partie d'elle. Même si elle le faisait, on verrait alors l'horrible visage de sa vilitude. La perversité de ses pensées noires. Un monstre qui ne lui ressemble pas mais qui vit en elle. Qui se nourrit de tout ce que les autres ont pu lui apporter.

    Sa vie a comme un arrière goût de tragédie. Elle est telle une robe de bal froissée, une feuille blanche délaissée sur une table.

    Melo', bien qu'ayant un visage morne, un visage froid, avait mis son plus beau costume pour la pièce qu'elle allait jouer.

    Elle entre sur scène, les visages sont marqués de stupéfaction. *
    Que se passe-t-il ? Mon masque ne cacherait-il mes vices qu'en apparence ? * Ses pieds foulent le sol, caressent la poussière qui jonche le sol de toute part. D'un regard grave, elle s'adresse à Namoga... La pièce nommée " Confidence " commenca alors.

    " Namoga... Ce soir, j'ai envie d'enlever ce masque... "

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  • | 8 |

    Et elle voit ce visage. Ce visage tant plaisant, tant agréable. Des pétales de roses lui tombent dessus grâce au doux souffle du vent. Le bellâtre s'approche pour lui donner un baiser. Mais avant... Il murmure quelque chose. Inaudible. Melo' ne comprend pas. Il lui murmure des mots et voyant qu'elle ne comprend pas, il s'en va, le sourire charmant ne disparaissant pas de son visage.

    " Reviens... Ne me laisse pas seule... Trop de gens sont partis de ma vie. Tu m'as apporté un bonheur instantané par ta présence. "

    Le visage s'éloigne dans la brume. Ses gestes se font indécis. Pas à pas, il recule. Et s'en va comme les souvenirs font place au présent heureux.

    Le bruissement des feuilles donne un aspect pacifique aux choses. Melo' pleure à nouveau. Elle le pleure. Elle a vu son bonheur. Elle l'a vu s'échapper, lui et son sourire. Ses larmes ruissellent sur les pétales laissées par le vent au sol.

    Soudain comme une chuchottement. Chuchottement qui se fait bruit incessant. Bruit qui se fait chaos. Elle ne le supporte pas. Comme un ultra-son transpercant son ouie d'un bruit effroyable. Mais bien qu'exercant une pression sur ses oreilles pour ne point entendre, le bruit la traverse de part en part. Tout tremble. Etrange sensation.

    " Melo' réveille-toi. ", hurla la mère de celle-ci.

    Réveil douloureux. Car contrairement aux autres fois, elle se souvient de la veille. Elle se souvient de cette lame passionnelle qui lui cisaillait le coeur à chaque instant. *
    Oui Melo', il faut aller de l'avant. Faire avec. Vivre avec. Si tu ne le fais pas, cette illusion romantique te tuera. *

    " On va chez Marragita... Lève-toi. ", dit-elle d'un ton sec.

    Evidemment Melo' était la dernière au courant. Avec Mercant. Tous deux montrèrent un faible enthousiasme. Parce qu'évidemment ils étaient les deux seuls à devoir porter la croix de l'ennui ce jour-ci.

    13h. Départ pour l'Allemagne sous un soleil chatoyant. Mais à trop le regarder, Melo' cligne nerveusement des yeux. *
    Oui ce soleil que j'aurais voulu voir avec toi... Je n'ai plus que mes yeux pour l'admirer maintenant. *

    14h. Arrivée à l'endroit si attendu. C'était une grande maison, avec un petit verger. La verdure luisante donnait une impression de paradis. Des tomates, des choux. De quoi se nourrir pendant au moins une décennie. Mais ce n'est pas ce qui intéressait Melo'. D'ailleurs rien ne l'intéressait. Melo' éteint son mp3 et se dirige vers la maison.
    A peine entre-t-elle qu'une grande émotion la submerge. Il faisait sombre, les stores étaient fermés. Ce qui la surprenait c'était de voir à quel point l'endroit reflétait la maîtresse de maison. Depuis que son fils avait quitté le domicile familial, Marragita vivait seule. Dans cet endroit calme mais froid d'émotions. Cette chambre au fond du couloir, qui devait être la seule pièce chaude de la demeure, attira l'attention de Melo'. Mais elle n'y entra pas... Des souvenirs pourraient ressurgir. Lui rappeler ce qu'elle fait dans la sienne. Et l'obscurité de la pièce n'arrangerait rien. Les hôtes rejoignent alors le salon. Salon peu orné. Mais il y avait ce vaisselier, où se trouvaient des photos de la vieille dame jeune. Moment nostalgique lorsque les deux femmes évoquent l'enfance de Marragita.

    De leur côté, Melo' et Mercant, toujours aussi complices, s'ennuient ferme. Mercant tenta un vain divertissement qui consistait à traduire des mots vulgaires en d'autres langues. Mais ce jeu ne les amusa pas longtemps... Car ils étaient à cours de grossièretés. Las d'ennui, et poussés par une violente envie de repos, les deux compagnons s'endormirent sous le regard amusé des deux femmes.

    A leur réveil, Marragita annonca qu'elle comptait faire la cueillette aux cerises. La mère des deux garnements aquiesca d'un vif ' Oui ' et poursuivit par un ' Au moins ca vous fera bouger '... *
    La cueillette aux cerises ?!! Et tu veux pas que jfasse du blé au moulin du coin tant que t'y es ? * Melo' considéra sa mère avec un grand dédain et se leva difficilement.
    Durant tout le chemin, Melo' rumina, arrachée à un sommeil si doux. Et qui pour une fois n'était pas dû aux paradis artificiels. La machine s'arrête dans un endroit désert. Hautes herbes. Papillons, abeilles, et insectes du genre peuplent cet endroit flegmatique.

    Après avoir cueilli quelques cerises, Melo' s'éloigne. Etrangement elle se sent sereine. Si sereine qu'elle en oublierait presque qu'elle chante. Comme si tout s'était dissipé dans un nuage d'insouciance instantané. *
    Et si finalement ca n'était pas grave... Tu as toujours cet espoir. Tu l'aimes et alors ? Tu ne sais pas si c'est de l'affection ou pas, et alors ? Profite de ta vie tant que tu peux le faire. Ne te crée plus de problèmes qui n'ont pas lieu d'être. Car tout ce que ça t'a apporté c'est des flots de larmes, et l'effet malsain de l'alcool. *
    Et Melo' danse ... Au milieu du champ, Melo' danse d'un bonheur imprévu. Elle se sent légère comme le vent qui fait tomber les cerises sur l'herbe. Elle sent le doux vent effleurer sa peau. Un bien être qui lui appartenait. Un moment de joie rien qu'à elle.

    Mais toute bonne chose a une fin... Mercant la prend par le bras et l'emmène vers la voiture. Mais Melo' garde ce sourire ingénu car elle était soulagée. Libérée par ses propres mots, soulagée par sa propre conscience, Melo' s'en va vers un nouvel horizon...


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  • J'interromps mon élan littéraire pour faire cet article dédiées à celles qui m'ont supportées pendant 3 longues années. Qui m'ont fait rire, pleurer, chanter... (?)

     

    On était toutes congestionnées dans ce putaing de Photomaton... On a souffri toutes ensembles. On a eu des crampes. ><




    Mais ca valait le coup... Puis après tout, il faut souffrir pour être heureux. =)


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    Et elle pensait à lui... Incessament. Une gorgée.

    *
    Davko, je t'ai aimé. J'ai compris ta décision. Je t'aime même d'un sentiment qui transcende l'amour. Mais tu ne me sais pas dans cet état de tristesse. Et je ne veux pas que tu me saches ainsi... *

    Elle l'avait tant aimé. La rupture fut brutale mais douce. Car le lien n'avait pas été rompu.

    Elle se souvient encore de leurs vieilles taquineries. Des " Je t'aime, moi non plus " qui les faisaient tant rire. Elle se souvient du jour où il lui avait dit qu'il avait voulu réparer son coeur. Elle voit comme ca l'avait touchée...

    Chaque visage qui ressemblait un peu à Davko, lui rappellait l'homme qu'il avait été avec elle. Et qu'il aurait été s'il avait été auprès d'elle.

    Ce 14 février. Un SMS. Des mots singuliers pour elle. Elle ne les oubliera jamais. Elle était trop heureuse pour y croire. Elle se sentait enfin belle et exceptionnelle pour quelqu'un. Malgré la distance, leur relation était fusionnelle. Ils ne manquaient pas de dire qu'ils s'aimaient.

    Mais Melo' sentait que quelque chose n'allait pas. Comme une poussière d'étoile dans l'oeil qui l'empêchait de contempler son bonheur. Melo' s'accrochait à l'espoir... A son illusion. Elle l'aimait de plus en plus. Son absence ne faisait que renforcer son amour pour lui. Elle s'était dit que personne n'aurait raison de cet amour.

    2 gorgées. Et elle se dirigeait lentement vers la déchéance ...

    Mais cette prospérité ne dura pas. Une chose avait reussi à les séparer. Cruel destin. C'est une belle femme au teint poupin, aux lèvres sensuellement sanguines et au regard froid comme février. Au début des amours de Melo' et de Davko, cette dame se faisait discrète voire inexistante. Mais plus la relation des deux êtres était importante, plus la dame se faisait imposante et invivable. De ses attributs, la jeune femme est parvenue à ses fins : séparer les deux amants. Sa mission finie, elle s'en va, disparaît dans la détresse de leurs mots, s'efface comme la mer gomme les pas vagabonds sur le sable... Cette marâtre n'est autre que Dame Distance.

    Tous ces mots se bousculent dans sa tête. Elle n'est pas stable sentimentalement. Et elle le sait. Mais l'heure est aux regrets...

    Melo' s'allonge sur le lit. Le regard triste dans le vide. Ce vide qui s'était installé depuis ce jour de mai.

    Vide intellectuel. Melo' ferme les yeux, car la pièce tourne, et est d'un flou étrangement éthylique. 2 minutes plus tard, Melo' s'endort. Des traces noires sur ses joues témoignent de sa mélancolie nocturne...

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